La bouillie bordelaise est un fongicide à base de cuivre et de chaux. Cette substance est très utilisée par les jardiniers pour lutter contre les divers maladies et parasites. Sous forme de sulfate, le cuivre est le principal composant de la bouillie bordelaise. Celle-ci fait partie des solutions naturelles pour combattre les maladies du jardin comme le mildiou. Mais ce remède est-il aussi inoffensif que ce que l’on pense ? En effet, des scientifiques ont incontestablement prouvé l’efficacité fongicide du cuivre, c’est-à-dire sa capacité à tuer certains champignons, mais sans découvrir comment celui-ci agit sur la nature. Alors, la bouillie bordelaise serait-elle considérée comme naturelle et bio à tort ?
La bouillie bordelaise n’est pas un nouveau produit. Elle est utilisée depuis le XIXe siècle et c’est en 1882 que le botaniste Alexis Millardet se rend compte de l’absence du mildiou suite à la vaporisation de la bouillie bordelaise sur les vignes.
Aujourd’hui, seul le cuivre est autorisé dans l’agriculture biologique en tant que fongicide. Lorsque l’environnement est favorable au mildiou (feuilles noires, champignons, pourrissement), les jardiniers appliquent entre 10 à 15 traitements par an !
L’excès de cuivre pollue-t-il le sol ?
Malheureusement, la réponse est oui ! Après plus de 50 applications de bouillie bordelaise, le cuivre commence à avoir des effets néfastes. En effet, les plantes ne peuvent pas l’absorber complètement. Les sols deviennent alors saturés en cuivre. Un rapport de l’Inra publié en janvier 2018 donne des valeurs effroyables. En effet, on compterait entre 200 et 500 mg/kg de cuivre contre 3 à 100 mg/kg seulement pour un sol non traité.
En plus de combattre les maladies, le cuivre tue aussi les vers de terre, les germes et une partie de la vie microbiologique de la terre. Or, la terre a besoin de ces micro-organismes, car ils contribuent à décomposer les matières organiques qui forment l’humus qui nourrit le sol en eau et nutriments en surface. En perturbant ce processus naturel, le cuivre appauvrit les sols.
Un projet d’interdiction oublié et des effets néfastes sur la santé
Saviez-vous qu’en 1991, lors de la préparation du règlement sur l’agriculture biologique, l’Union européenne prévoyait l’interdiction totale du cuivre pour 2002 ? En effet, il était considéré comme toxique à l’environnement. Mais il est tellement utilisé par les agriculteurs spécialisés dans le secteur du bio contrôlé par le lobby des industriels de la filière que le projet est passé aux oubliettes.
Pourtant, le sulfate de cuivre est la forme de cuivre la plus nocive pour l’homme ! Toxique en ingestion, irritant cutané et oculaire, il pourrait même affecter la fertilité selon l’Echa (agence européenne des produits chimiques). Mais il peut également causer des dommages aux foetus ou aux organes après une exposition trop longue. Bien sûr, cela est dû au cuivre ingéré que l’on peut retrouver dans l’eau après avoir contaminé les nappes phréatiques.
Par inhalation, nous ne sommes encore sûrs de rien et les études font défaut. Cependant, dans une étude datant de 1969, des chercheurs de la faculté de médecine de Lisbonne ont parlé du “syndrome du poumon des pulvérisateurs des vignes”. Cette étude révèle une altération des tissus pulmonaires pouvant mener à une insuffisance respiratoire ou à des lésions du foie.
En conclusion, la bouillie bordelaise reste un sujet encore très controversé. Affaire à suivre…
Source : 60 millions de consommateurs – n°126S – août-septembre 2018
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